"Nous voulons nous exprimer avec prudence et retenue, car nous n'avons a priori pas compétence pour nous occuper de l'enseignement secondaire". Le président de la Conférence des grandes écoles, Pierre Tapie, a pris maintes précautions, face à la presse le 21 juin 2011, pour avancer sur le terrain de la réforme du lycée. Mais tout de même. "Nos écoles ne peuvent recruter qu'à partir de la base sociale issue des lycées, a-t-il fait remarquer. Et d'autre part, le niveau de ceux que nous amenons à bac+5 ne peut être indépendant du bagage des bacheliers".
Après avoir salué certains points qui lui paraissent "intéressants" et donc positifs, comme l'autonomie plus grande accordée par la réforme à chaque proviseur dans son établissement, Pierre Tapie, qui est aussi le directeur général du groupe Essec, en est donc venu aux points qui fâchent.
Après avoir salué certains points qui lui paraissent "intéressants" et donc positifs, comme l'autonomie plus grande accordée par la réforme à chaque proviseur dans son établissement, Pierre Tapie, qui est aussi le directeur général du groupe Essec, en est donc venu aux points qui fâchent.
Baisser le niveau d'exigence théorique en science
Premier sujet d'inquiétude pour les grandes écoles, et notamment les écoles d'ingénieurs, la baisse supposée des exigences théoriques en sciences expérimentales, notamment en physique-chimie. "Si nous allons vers la généralisation de l'esprit "Main à la pâte", qui est parfait en primaire, au collège et au lycée, au détriment de la conceptualisation, nous courons à la catastrophe", indique Pierre Tapie, lui-même polytechnicien, pour qui l'utilisation des mathématiques reste un parcours obligé pour former les futures élites, en tout cas permettre aux bacheliers de ne pas "exploser" en première année de classe préparatoires aux grandes écoles (CPGE).
En toile de fond, la Conférence des grandes écoles (CGE) rappelle par la voix de son président combien la désaffection des filières et des métiers scientifiques la préoccupe. De même que le taux élevé d'échec ou d'abandon en première année postbac "par manque de préparation à l'enseignement supérieur", ou que le faible taux de filles en classes prépa scientifiques. Elle s'inquiète aussi de la perte de position de la France dans les tests internationaux Pisa qui mesurent les aptitudes des lycéens. "En tant que grandes écoles, nous sommes concernés et consternés par le fait que la France soit passée de la 17ème à la 22ème place pour ce qui est des compétences mathématiques. Et quand on constate que les "illettrés mathématiques" sont passés de 12% à 18% à l'entrée en 6ème, c'est terrifiant !".
La réforme du lycée ne tente-t-elle pas de rendre la terminale S plus scientifique, en accentuant sa spécialisation ? "Oui mais la classe de première est plus indifférenciée et quand vous regardez globalement le nombre d'heures de cours scientifiques sur la première et la terminale, on perd au moins 3 heures !" Le nouveau lycée permettra-t-il alors de produire asssez de bons scientifiques pour les grandes écoles, c'est là toutes leurs craintes...
En toile de fond, la Conférence des grandes écoles (CGE) rappelle par la voix de son président combien la désaffection des filières et des métiers scientifiques la préoccupe. De même que le taux élevé d'échec ou d'abandon en première année postbac "par manque de préparation à l'enseignement supérieur", ou que le faible taux de filles en classes prépa scientifiques. Elle s'inquiète aussi de la perte de position de la France dans les tests internationaux Pisa qui mesurent les aptitudes des lycéens. "En tant que grandes écoles, nous sommes concernés et consternés par le fait que la France soit passée de la 17ème à la 22ème place pour ce qui est des compétences mathématiques. Et quand on constate que les "illettrés mathématiques" sont passés de 12% à 18% à l'entrée en 6ème, c'est terrifiant !".
La réforme du lycée ne tente-t-elle pas de rendre la terminale S plus scientifique, en accentuant sa spécialisation ? "Oui mais la classe de première est plus indifférenciée et quand vous regardez globalement le nombre d'heures de cours scientifiques sur la première et la terminale, on perd au moins 3 heures !" Le nouveau lycée permettra-t-il alors de produire asssez de bons scientifiques pour les grandes écoles, c'est là toutes leurs craintes...
Ne pas perdre les élèves à fort potentiel des lycées moins défavorisés
Mais Pierre Tapie va plus loin, s'avançant sur le terrain, délicat pour les grandes écoles, de la sélection sociale. "Nous craignons aussi que la plus grande autonomie laissée aux établissement conduise à une plus grande hétérogénéité. Ainsi dans un bon lycée de centre ville fréquenté par des familles visant les classes prépa, le proviseur pourra décider d'introduire 4 heures de sciences en plus par semaine. Alors que dans le lycée de campagne ou de banlieue, on n'aura peut-être pas cette exigence".
D'où la crainte exprimée par la CGE de perdre "les jeunes à fort potentiel qui seront dans les lycées les moins favorisés". Le projet défini par leur établissement ne risque-t-il pas de mettre en avant d'autres objectifs, plutôt que de chercher à les amener le plus haut possible ? Pierre Tapie a sur ce point communiqué la déception de la CGE concernant les classes prépas réservées aux bacheliers technologiques. "Ces classes qui leur sont pourtant réservées ne font pas le plein, a-t-il regretté. Est-ce parce que les proviseurs préfèrent garder en BTS les bons élèves ?" En tout cas, le recrutement "plus large" visé par ces classe semble en panne.
Or selon Pierre Tapie, la "baisse de niveau" que risque d'induire à terme la réforme du lycée se fera au détriment les élèves les moins portés par leur environnement. "Les familles de cadres supérieurs parisiens ou de Versailles n'hésiteront pas, elles, à envoyer leurs enfants dès la première fait un e-level scientifique en Angleterre". Une préoccupation d'autant plus vive, que selon Pierre Tapie, au niveau international, le niveau d'exigence s'élève. "Il y a une vraie concurrence intellectuelle et elle est mondiale, explique-t-il. Et il faut réaliser que les bacheliers qui entreront par exemple en 2013 à l'Insa Lyon devront atteindre en cinq ans un niveau bien supérieur au niveau actuel". 2013, l'année où sortira justement la première promo des lycéens issus de la réforme.
D'où la crainte exprimée par la CGE de perdre "les jeunes à fort potentiel qui seront dans les lycées les moins favorisés". Le projet défini par leur établissement ne risque-t-il pas de mettre en avant d'autres objectifs, plutôt que de chercher à les amener le plus haut possible ? Pierre Tapie a sur ce point communiqué la déception de la CGE concernant les classes prépas réservées aux bacheliers technologiques. "Ces classes qui leur sont pourtant réservées ne font pas le plein, a-t-il regretté. Est-ce parce que les proviseurs préfèrent garder en BTS les bons élèves ?" En tout cas, le recrutement "plus large" visé par ces classe semble en panne.
Or selon Pierre Tapie, la "baisse de niveau" que risque d'induire à terme la réforme du lycée se fera au détriment les élèves les moins portés par leur environnement. "Les familles de cadres supérieurs parisiens ou de Versailles n'hésiteront pas, elles, à envoyer leurs enfants dès la première fait un e-level scientifique en Angleterre". Une préoccupation d'autant plus vive, que selon Pierre Tapie, au niveau international, le niveau d'exigence s'élève. "Il y a une vraie concurrence intellectuelle et elle est mondiale, explique-t-il. Et il faut réaliser que les bacheliers qui entreront par exemple en 2013 à l'Insa Lyon devront atteindre en cinq ans un niveau bien supérieur au niveau actuel". 2013, l'année où sortira justement la première promo des lycéens issus de la réforme.
Quid des nouveaux concours d'entrée ?
La CGE, qui annonce déjà une autre conférence de presse en septembre 2011 quand les "nouvelles premières" feront leur première rentrée, souhaite donc ouvrir le débat, en regrettant de n'avoir pas été consultée pour la mise en place de la réforme. "Il faut que l'enseignement supérieur, via la CGE et la CPU (conférences des présidents d'université) s'intéresse davantage au secondaire", a martelé Pierre Tapie.
Et quid des sujets sur lesquels les grandes écoles ont souvent été mises en cause, notamment par le gouvernement, comme la trop grande sélectivité des concours pour les étudiants issus de milieux sociaux moins favorisés ? "Nous travaillons sur les concours 2013, a assuré le président de la CGE, notamment les épreuves de langues". "Cependant, c'est d'abord le programme des CPGE qu'il faudra revoir en 2013, lorsque les premiers bacheliers de la réforme sortiront. Les concours en découleront."
Or le programme des classes prépa ne pourra pas ne pas tenir compte des acquis faits au lycée.
Une autre étude faite actuellement par la CPE à propos des passerelles pourrait bouleverser le paysage des études postbac. Ses résultats, qui seront dévoilés en octobre 2011, font apparaître selon Pierre Tapie un recrutement de plus en plus important des grandes écoles via les admissions parallèles. Le modèle dominant des CPGE, "que les pays étrangers nous envient" assure Pierre Tapie, est donc de lui-même en train d'évoluer.
Lire aussi :
Grandes écoles : Valérie Pécresse veut des concours plus justes
Réforme du lycée : une brochure présente les nouvelles premières
Et quid des sujets sur lesquels les grandes écoles ont souvent été mises en cause, notamment par le gouvernement, comme la trop grande sélectivité des concours pour les étudiants issus de milieux sociaux moins favorisés ? "Nous travaillons sur les concours 2013, a assuré le président de la CGE, notamment les épreuves de langues". "Cependant, c'est d'abord le programme des CPGE qu'il faudra revoir en 2013, lorsque les premiers bacheliers de la réforme sortiront. Les concours en découleront."
Or le programme des classes prépa ne pourra pas ne pas tenir compte des acquis faits au lycée.
Une autre étude faite actuellement par la CPE à propos des passerelles pourrait bouleverser le paysage des études postbac. Ses résultats, qui seront dévoilés en octobre 2011, font apparaître selon Pierre Tapie un recrutement de plus en plus important des grandes écoles via les admissions parallèles. Le modèle dominant des CPGE, "que les pays étrangers nous envient" assure Pierre Tapie, est donc de lui-même en train d'évoluer.
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