"En deuxième année de médecine, on a tous des profils et des itinéraires différents"

Sur le stand du tutorat des universités franciliennes, ils accueillent les lycéens qui rêvent de faire des études de médecine. Eux ont eu la chance d'arriver en P2, comprenez en deuxième année de médecine. Ces étudiants ont surmonté les embûches de la sélection de première année qui reste toujours forte, mais par des voies ou des stratégies différentes.

Car si la réforme de l'entrée en filière santé - avec les filières PASS et L.AS et l'introduction des oraux - est loin d'être parfaite, elle fait pourtant place à des profils d'étudiants plus variés qu'autrefois. 

En écoutant Jérémy, Angelina, Quoc Huy, Jade ou Alicia, on voit que chacun a choisi son université, sa filière, sa mineure, sa méthode de travail, et a dû sa réussite à un atout différent. Pour faire médecine, il n'y a donc plus de voie unique, mais une pluralité de chemins présentant chacun leurs avantages.

 

Lire aussi notre article orientation :
PASS ou LAS : quelle voie choisir pour faire médecine ?

Jérémy, lui, avait un profil plutôt classique pour les études de médecine. "J'ai toujours été très orienté santé, raconte-t-il, et en terminale j'ai gardé les spécialités SVT, Physique-chimie, et maths complémentaires."

En 2022-2023, il s'inscrit donc à l'université Paris Cité en PASS, le "parcours d'accès spécifique santé", cursus correspondant à l'ancienne première année de médecine ou PACES. Il rejoint les 2000 étudiants de PASS à qui l'université réserve 620 places en filières MMOPK (médecine, maïeutique, odontologie, pharmacie, kiné) dont 375 places en médecine.

Mais il a du mal à tenir la distance. "Au concours du premier semestre, j'étais 350ème. Mais au deuxième, je suis descendu à la 499ème place😓 ".
 

Son salut, Jérémy l'a dû à l'oral. Et sans doute aussi à sa persévérance et au travail d'équipe. En plus des épreuves écrites, chaque université propose en effet des épreuves orales destinées à prendre en compte des compétences transversales (capacité à communiquer, à argumenter) et parfois la motivation.

"Je n'avais rien à perdre alors je me suis préparé à fond, raconte-t-il. J'ai suivi la préparation de la fac, mais surtout celle du tutorat qui a été très efficace. On s'entrainait tous les jours en petits groupes sur des sujets, l'ambiance était bonne. Le jour-même, j'ai eu un sujet sur les centenaires en France, et puis une analyse de figures sur l'accès aux technologies. On m'a posé beaucoup de questions, je croyais avoir raté".

Une remontada de 250 places grâce à sa note d'oral !

Mais à la réception des résultats, c'est la "grosse bonne surprise" pour lui : "j'ai eu 17,8 et j'ai remonté à la 243ème place !" En effet certaines universités* comme Paris Cité accordent des coefficients de plus de 50% à ces oraux. Une carte que Jérémy a su saisir à temps.


* : la part des oraux devrait être unifiée dans toutes les universités suite à la décision du Conseil d'Etat de décembre 2023.
 

Angelina a aussi choisi de faire un PASS, mais à l'université de Sorbonne Paris Nord (ex Bobigny). Pourtant elle ne doit pas sa réussite à ses notes dans les matières de santé ou de sciences, mais... de droit !

En effet, un cursus PASS comporte une majeure santé équivalent à 36 ECTS, mais les étudiants doivent aussi choisir d'étudier une "mineure" dans un autre domaine, scientifique ou non, qui représente 12 ECTS. S'ils ne réussissent pas à entrer en médecine (ou une autre filière MMOPK), ils peuvent poursuivre leurs études en deuxième année dans la licence correspondant à leur mineure.

Dans la plupart des PASS, les notes obtenues dans la mineure doivent être supérieures à 10, mais n'entrent pas dans les notes classantes du concours. Or à l'université Sorbonne Paris Nord, elles sont au contraire prises en compte pour le passage en médecine !
 

"Moi j'avais choisi la mineure Droit, sur les conseils de ma mère. En fait, je déconseille, car cela représente énormément de travail en plus des matières de santé."

Angélina a donc choisi une stratégie étonnante : "j'ai complètement laissé tomber le droit dans l'année, mais je m'y suis remise à fond 15 jours avant les épreuves d'examen. Comme j'avais acquis de bonnes méthodes de mémorisation🤯 , je retenais tout hyper bien. Et finalement, j'ai majoré le droit 👍."

Angélina obtient donc les meilleures notes de sa promo en mineure droit... "et quand on majore, on obtient trois points de plus de moyenne générale, ce qui m'a fait passer de 14,7 à 17,7 de moyenne". La mineure étant prise en compte dans les notes classantes, Angélina a passé la barre haut la main... grâce au droit. Comme quoi il est très important de scruter les principes de notation et de classement propres à chaque université.
 

Jade aussi doit une bonne partie de sa réussite à une matière non liée à la santé. Elle n'a toutefois réussi son entrée en médecine qu'à la deuxième tentative.

Après le bac (avec les spécialités maths et SVT), elle s'est d'abord inscrite en PASS en choisissant une mineure droit. "Mais je n'ai pas réussi l'entrée en médecine, et j'ai dû partir en licence avec accès santé (ou L.AS)"

La loi interdit en effet le redoublement en PASS, mais l'étudiant qui ne réussit pas son entrée en médecine peut retenter une deuxième fois sa chance en faisant une licence "avec accès santé". Son ancienne mineure de PASS devient alors sa majeure disciplinaire de licence et les matières liées à la santé deviennent une mineure ou une option. 

On voit alors l'importance de bien choisir sa mineure de PASS : non seulement pour se réorienter vers un domaine que l'on aime si l'on ne peut pas entrer dans la filière MMOPK, mais aussi pour maximiser ses chances de réussite lors de sa deuxième tentative en L.AS.

Or justement, Jade n'avait pas aimé le droit en PASS et ne se voyait pas du tout dans une licence en droit 😩. Par chance, elle peut alors basculer vers une licence d'économie avec accès santé (réorientation acceptée par son université mais nullement garantie).

"Or je me suis rendu compte que j'étais très bonne en économie. Cela m'a permis de consacrer beaucoup plus de temps 🕓 aux matières santé. Et au final, j'ai eu 19 dans les matières de la licence d'économie, et 13 sur l'option santé. Comme c'était la moyenne des deux notes qui comptait, j'ai eu plus de 16 et j'ai fini 9ème au classement !".

 

Ces parcours de réussite montrent tout l'intérêt d'avoir un profil scolaire équilibré avec plusieurs points forts 💪💪✔✔👏 . C'est aussi ce qui a réussi à Quoc Huy, étudiant d'origine vietnamienne, qui a décroché du premier coup son entrée en P2 (deuxième année de médecine) à l'université Paris-Créteil (UPEC). En PASS ou en L.AS ?

La particularité de l'UPEC est de n'offrir que des L.AS. Mais on peut choisir une majeure santé avec option santé (équivalente d'une PASS). Sur Parcoursup, c'est la "licence Sciences pour la santé option santé".
 

"Cependant, 50% des matières sont liées aux sciences et 50% à d'autres domaines, explique Quoc Huy. Exemple : éco-gestion, anglais, humanité en santé, psychologie et sciences sociales... Et comme toutes les matières ont le même coefficient et comptent pour l'examen classant, il faut travailler toutes les matières".

Son conseil ? "Il faut faire beaucoup de QCM✔✔✔✔ , c'est comme cela que j'ai réussi ! Le stage de pré-rentrée m'a aussi permis de prendre le rythme dès le début".
 

Dernier exemple avec Alicia, dont l'itinéraire dit l'importance de la persévérance et surtout de la motivation. "Moi, je n'étais pas une flèche en sciences, et quand j'ai dit à mes profs de terminale que je voulais faire médecine, ils m'ont tous découragée😢. Mais je voulais exercer une métier de contact, de relation, et j'avais une tante kiné qui me donnait envie en me parlant de ses patients !".

Sur Parcoursup, elle postule donc pour plusieurs PASS et L.AS. "Mais on était en 2020, l'année du confinement et du lancement de la réforme, raconte-t-elle, et la seule proposition que j'ai eue était en PASS dans une mineure maths-physique ! J'ai pris peur et j'ai refusé pour faire une P0 afin d'élever mon niveau scientifique".

Une P0 est une année préparatoire proposée par des organismes privés. Seul problème, les universités y sont farouchement opposées et les étudiants perdent souvent toutes leurs chances d'être pris en PASS ou L.AS sur Parcoursup l'année suivante (car les candidatures sont supérieures aux places offertes et les néo-bacheliers sont privilégiés). 

 

Déterminée🦾 , Alicia dépose donc directement son dossier à l'université Versailles Saint-Quentin (78). On le refuse, mais elle revient quatre fois à la charge... et son inscription finit par être acceptée (encore une exception !).

"J'ai choisi un cursus PASS avec une mineure "rééducation réadaptation", car la psychomotricité m'attirait aussi". Elle valide son année (avec plus de 10 de moyenne), mais rate l'entrée en médecine à cause de l'oral. Elle se retrouve alors logiquement en deuxième année de licence de rééducation réadaptation avec accès santé, L.AS qui permet aussi l'accès aux études de kiné. 

"Et là, j'ai adoré ! je me suis éclatée dans cette L.AS, dit-elle, car j'aimais beaucoup les matières autour de la rééducation, c'était encore de la santé, et finalement, j'ai réussi l'entrée en médecine". 

 

"On a tous des profils différents et des motivations différentes", soulignent au final ces étudiants. Scientifiques purs et durs 🤓, profils attirés par la recherche médicale 👨‍🔬, fans de séries médicale rêvant de sauver des vies🚑 , personnalités tournées vers la relation humaine 👪😍 , l'univers du soin👅, l'action sociale, la santé publique... Cette diversité de profils est d'ailleurs nécessaire pour pourvoir tous les postes et toutes les spécialités médicales dont a besoin le monde de la santé.

Pour être complet, il faudrait ajouter le témoignage d'un ou une étudiante entrés en L.AS après le bac et qui aurait réussi l'entrée en médecine en L1, L2 ou L3. Car les étudiants de licence avec accès santé ont eux aussi droit à deux tentatives sur les trois années.

Les étudiants ayant choisi une L.AS après le bac sont cependant beaucoup moins nombreux que ceux qui arrivent en deuxième année de LAS après un échec en PASS. 
 

L'objectif de la réforme est en effet que les effectifs des étudiants en deuxième année de médecine soient issus à 50% de PASS et 50% de LAS. Un petit nombre de places est aussi réservé à des diplômés de master ou d'écoles d'ingénieurs. Il faut savoir toutefois que les places réservées aux étudiants issus de LAS se répartissent sur les trois années de licence et toutes les disciplines de LAS...

Exemple : en 2022-2023, à l'UVSQ (université Versailles St-Quentin), 138 places étaient réservées aux étudiants de PASS et 138 places à ceux issus de LAS, chiffre qui englobait : 19 places pour les étudiants en LAS "rééducation réadaptation", filière empruntée par Alicia, 27 places pour les étudiants de première année de licence d'autres disciplines (LAS1) et 92 places pour des étudiants de LAS2 ou LAS3. 

Une LAS offre donc "moins de chances" qu'un PASS ? Tout dépend en réalité du profil de l'étudiant : certaines licences avec accès santé (LAS) s'adressent à des profils atypiques donc moins nombreux : par exemple une licence de langue avec accès santé va offrir peu de places vers les études de médecine, mais un étudiant bilingue avec un bon parcours scolaire dans toutes les matières au lycée pourra sans doute y réussir "plus facilement" qu'en PASS. 

Il est donc difficile de donner des "recettes" de réussite. La relecture de tous ces témoignages fait toutefois apparaitre qu'il est important de :

- Bien connaître son profil d'étudiant, ses points forts, ses points faibles (tant sur le plan disciplinaire que des méthodes de travail), et ses sources de motivation pour faire médecine
- Bien choisir sa mineure ou son option de PASS pour bien anticiper une réorientation en LAS dans cette discipline. De même, bien choisir sa discipline de LAS1. Cela veut dire qu'il faut passer beaucoup de temps sur Parcoursup pour visiter tous les PASS ou LAS qui pourraient vous intéresser. 
- Etudier à la loupe la façon dont l'examen classant est organisé dans l'université où l'on est admis : coefficient, matières concernées, oral... et adapter son travail en conséquence.
- Enfin et toujours : s'appuyer sur l'aide du tutorat, association étudiante dans laquelle des étudiants de P2 vous proposent un soutien, des QCM, des examens blancs, des révisions en petits groupes et un soutien psychologique et méthodologique. Ce service est supervisé par les enseignants et tout aussi (voir plus) efficace qu'une prépa privée.


La preuve : tous les étudiants qui donnent ici leur témoignage se sont engagés dans le tutorat de leur université pour aider à leur tour les étudiants de première année. Heureux de redonner ce qu'ils ont reçu.
 

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