L'exposition anatomique "Our body, à corps ouverts" qui se tient à l'Espace Madeleine à Paris va-t-elle être interdite ? La question est posée depuis que deux associations de défense des droits humains, "Solidarité Chine" et "Ensemble contre la peine de mort", ont assigné en justice les organisateurs pour obtenir son interdiction. "Our body, à corps ouvert" montre sur 1 200 m2 dix-sept corps d'hommes et de femmes, entiers ou disséqués, préservés avec des matières plastiques selon un procédé d'imprégnation polymérique. Les corps sont présentés dans des positions de la vie quotidienne - en train de tirer à l'arc, de jouer aux échecs - provoquant un effet saisissant de "mort-vivant" qui n'a pas manqué d'attirer les foules. L'expo a déjà tourné dans le monde, avant d'arriver en France, d'abord à Lyon puis à Marseille au printemps 2008 et à Paris en 2009 où après l'Espace Madeleine, elle doit être présentée au Parc Floral jusqu'au 23 août. La cité des Sciences de la Villette et le Musée de l'Homme ont refusé de l'accueillir à la suite d'un avis négatif du Comité national d'éthique.
''Our body'' : des corps de condamnés à mort chinois ?
Les associations qui attaquent se demandent si les corps exposés n'ont pas fait l'objet d'un trafic et s'ils ne sont pas ceux d'anciens prisonniers ou de condamnés à mort chinois. Les organisateurs ne cachent pas l'origine chinoise de l'expo, mais assurent que les corps ont été fournis par la fondation "Anatomical Sciences and Technologie de Hong Kong". "Il faut se demander si les corps, qui appartiennent à des hommes dans la force de l'âge, ne proviennent pas d'un trafic lié à la police chinoise", explique dans un communiqué Marie Holzman, sinologue et présidente de l'association Solidarité Chine. La Chine exécute en effet au moins 6 000 Chinois par an. Dans de nombreux cas, les parents des suppliciés se plaignent de n'avoir pas pu recueillir la dépouille de leur proche", ajoute-t-elle.
Le respect du corps humain est-il bafoué ?
Les avocats des deux parties se sont donc retrouvés lors de l'audience en référé le 1er avril. L'avocat des associations a invoqué le droit français et en particulier l'article 16 et suivants du Code civil qui stipule que "les restes des personnes décédées doivent être traités avec respect, dignité et décence", et que "le respect du corps humain ne cesse pas avec la mort". Or il a souligné que ces cadavres avaient été "découpés, dépecés, éviscérés et présentés jouant au échecs, au football ou tirant à l'arc." Les associations dénoncent par ailleurs l'objectif selon eux "mercantile" du projet, soulignant d'ailleurs le prix d'entrée élevé (15 euros). En face d'eux, les avocats des organisateurs de l'expo ont répliqué que leurs clients avaient au contraire eu le souci de faire une exposition artistique et éducative, et de mettre l'accent sur l'aspect scientifique dans le but de "désacraliser le corps humain". Le jugement sera connu le 9 avril. Pour en savoir plus sur l'expo : L'expo Our Body à Paris : leçon d'anatomie sur de vrais corps