Vous aidez des étudiants à s'adapter à la vie étudiante. Ne plus habiter chez ses parents, qu'est-ce que ça change ?
Dans l'école où j'interviens, plus de 80% des étudiants ne vivent en effet plus chez leurs parents pour la première fois : cette liberté les confronte à des responsabilités qu'ils ne soupçonnaient pas. Dès la rentrée, il y a par exemple la question des repas : comment se motiver à cuisiner lorsque l'on vit tout seul ? Comment manger équilibré tout en respectant un budget serré ?
Ceux qui ont pris une chambre doivent s'occuper de faire installer l'électricité ou le téléphone. Ce sont des tâches administratives qu'ils ignoraient totalement. Et puis, ils ont aussi à apprendre l'autonomie financière : comment gérer son budget sur un mois complet, tout en dépendant financièrement des parents?
Ceux qui ont pris une chambre doivent s'occuper de faire installer l'électricité ou le téléphone. Ce sont des tâches administratives qu'ils ignoraient totalement. Et puis, ils ont aussi à apprendre l'autonomie financière : comment gérer son budget sur un mois complet, tout en dépendant financièrement des parents?
Il y a aussi le travail, différent de celui du lycée. Comment résister à toutes les tentations (l'ordinateur, la télé, le frigo, le lit, le téléphone…) et se motiver à travailler ? Comment gérer le ménage, le rangement et les lessives tout en travaillant régulièrement ? Comment concilier les études et les loisirs ? Ce sont des sujets dont nous parlons.
Je me rends compte que certains ont aussi des problèmes de motivation et de moral : ils se demandent comment se motiver à se lever le matin et se coucher le soir. Ou comment gérer lorsqu'ils se retrouvent seul, le soir ou les week-ends.
Je me rends compte que certains ont aussi des problèmes de motivation et de moral : ils se demandent comment se motiver à se lever le matin et se coucher le soir. Ou comment gérer lorsqu'ils se retrouvent seul, le soir ou les week-ends.
Certains rencontrent-ils des difficultés d'adaptation ?
Oui car le lieu où ils font leurs études est souvent éloigné du domicile familial. Ce n'est donc pas uniquement de leurs parents qu'ils s'éloignent en déménageant, mais également de leur ville, de leurs amis (ceux qu’ils connaissaient depuis le lycée, le collège, voire même avant…) et donc de tout cet environnement rassurant qu'ils avaient apprivoisé et qui les soutenait depuis plusieurs années.
Quitter le domicile des parents est donc très excitant, mais cela peut aussi provoquer des inquiétudes… En début d’année, alors que nous parlions de la quantité de travail qu’ils allaient devoir fournir pour atteindre le niveau exigé en maths et en physique, une étudiante m’a interrompue pour me dire : «il faut que vous compreniez une chose madame : nous, quand on débarque, la question qu'on se pose, c'est comment on va se faire des amis. Les cours, c'est vrai que c'est important, mais avant les premières examens, c'est vraiment secondaire".
Quitter le domicile des parents est donc très excitant, mais cela peut aussi provoquer des inquiétudes… En début d’année, alors que nous parlions de la quantité de travail qu’ils allaient devoir fournir pour atteindre le niveau exigé en maths et en physique, une étudiante m’a interrompue pour me dire : «il faut que vous compreniez une chose madame : nous, quand on débarque, la question qu'on se pose, c'est comment on va se faire des amis. Les cours, c'est vrai que c'est important, mais avant les premières examens, c'est vraiment secondaire".
Etre soutenu par un groupe d'amis reste très important ?
Photos : Dreamstime
Au lycée, vous connaissez les autres élèves depuis plusieurs années. La classe forme un groupe que vous apprenez à connaître dès les premières semaines : c’est de toute façon toujours le même, à chaque cours et pendant toute l’année.
A l'université, les étudiants ont de nombreux cours dans des amphithéâtres accueillant plusieurs centaines de personnes, et des TD au sein desquels ils ne sont jamais avec les mêmes personnes. Cela génère un sentiment d'anonymat qui met en difficulté beaucoup d'entre eux : comment aller vers les autres ? Comment faire le deuil des relations d’amitié qui s’étaient nouées au lycée, et trouver le temps et l'envie d'en créer de nouvelles ?
La priorité reste de retrouver un groupe d’appartenance dans lequel on se sent bien : accepté et reconnu. Car il y a beaucoup de changements liés aux contenus des cours, aux modes d'évaluation, à l'exigence des professeurs et aux difficultés de la vie quotidienne à surmonter. Le soutien d'un groupe de pairs est indispensable pour vivre tout cela.
A l'université, les étudiants ont de nombreux cours dans des amphithéâtres accueillant plusieurs centaines de personnes, et des TD au sein desquels ils ne sont jamais avec les mêmes personnes. Cela génère un sentiment d'anonymat qui met en difficulté beaucoup d'entre eux : comment aller vers les autres ? Comment faire le deuil des relations d’amitié qui s’étaient nouées au lycée, et trouver le temps et l'envie d'en créer de nouvelles ?
La priorité reste de retrouver un groupe d’appartenance dans lequel on se sent bien : accepté et reconnu. Car il y a beaucoup de changements liés aux contenus des cours, aux modes d'évaluation, à l'exigence des professeurs et aux difficultés de la vie quotidienne à surmonter. Le soutien d'un groupe de pairs est indispensable pour vivre tout cela.
Les enquêtes montrent qu'un grand nombre d'étudiants souffrent tout de même de solitude...
"Une étudiante m'a raconté récemment qu'elle oubliait régulièrement de manger le soir chez elle. Le stress des examens conduit parfois à s’impliquer dans son travail scolaire, sans plus prêter attention au temps qui passe (en particulier pour ceux qui concentrent leurs révisions sur les quelques jours qui précèdent l'épreuve).
Mais c'est souvent effectivement la difficulté à gérer la solitude qui conduit de nombreux étudiants à reculer autant que possible le moment de rentrer chez eux. Habituellement, on partage le temps du repas avec d'autres. Quel est l’intérêt de passer du temps à préparer un repas que l'on va devoir manger seul, devant la télé ou l'ordinateur ?
Cette étudiante avait alors trouvé une astuce ingénieuse : deux fois par semaine, elle s’était mise d’accord avec son voisin pour partager un repas commun. Une fois c’est lui qui cuisinait pour eux deux, et le soir suivant c'était elle.
Mais c'est souvent effectivement la difficulté à gérer la solitude qui conduit de nombreux étudiants à reculer autant que possible le moment de rentrer chez eux. Habituellement, on partage le temps du repas avec d'autres. Quel est l’intérêt de passer du temps à préparer un repas que l'on va devoir manger seul, devant la télé ou l'ordinateur ?
Cette étudiante avait alors trouvé une astuce ingénieuse : deux fois par semaine, elle s’était mise d’accord avec son voisin pour partager un repas commun. Une fois c’est lui qui cuisinait pour eux deux, et le soir suivant c'était elle.
Et les sorties ? Certains d'étudiants n'ont-ils pas tendance à abuser ?
Beaucoup d'enseignants et de parents pensent que le temps que les étudiants passent à «sortir et s'amuser» est le signe de leur absence de maturité. Ils seraient "grisés" par la liberté et ne penseraient qu’à «profiter de la vie» au détriment de leurs études.
Cette analyse n'est qu'en partie vraie. Car si sortir tous les soirs offre un plaisir immédiat, la plupart des étudiants ont à cœur de réussir leurs études. Quel intérêt de «faire la fête en permanence» si c’est au prix de l’échec aux examens à la fin de l’année scolaire ?
Les étudiants qui s'enferment dans un tourbillon de sorties, qui ne gèrent plus leur sommeil et ne parviennent pas à réguler leur rythme de vie, même après plusieurs mois d’adaptation, sont la plupart du temps ceux qui rencontrent des difficultés dans d'autres domaines : des difficultés de compréhension en cours, des difficultés à gérer un stress important dû à la pression des examens ou à une absence de confiance en eux. Certains peuvent aussi être démotivés parce que le contenu des cours ne correspond pas à ce qu'ils imaginaient, ce qui les amène à remettre progressivement en question leur projet d’orientation…
Cette analyse n'est qu'en partie vraie. Car si sortir tous les soirs offre un plaisir immédiat, la plupart des étudiants ont à cœur de réussir leurs études. Quel intérêt de «faire la fête en permanence» si c’est au prix de l’échec aux examens à la fin de l’année scolaire ?
Les étudiants qui s'enferment dans un tourbillon de sorties, qui ne gèrent plus leur sommeil et ne parviennent pas à réguler leur rythme de vie, même après plusieurs mois d’adaptation, sont la plupart du temps ceux qui rencontrent des difficultés dans d'autres domaines : des difficultés de compréhension en cours, des difficultés à gérer un stress important dû à la pression des examens ou à une absence de confiance en eux. Certains peuvent aussi être démotivés parce que le contenu des cours ne correspond pas à ce qu'ils imaginaient, ce qui les amène à remettre progressivement en question leur projet d’orientation…
Faut-il choisir son logement en fonction de ses besoins, de son caractère ?
C'est en effet une donnée qu’il est très important de prendre en compte. Il existe différentes formules de logement : à chacun de choisir celle qui lui convient le mieux en fonction de son caractère.
Loger au sein de la famille (chez des oncles ou tantes, des grands-parents...) permet, si c'est possible, de faire une transition en douceur et de s'habituer pas à pas à la vie étudiante avant de voler de ses propres ailes.
La résidence étudiante peut aussi constituer un bon compromis. Vous logez dans une chambre individuelle, mais vous êtes entouré d’étudiants qui comme vous, doivent travailler et ont à cœur de trouver leur voie. En cas de besoin, il n'y a pas à aller loin pour trouver de l'aide.
Par contre, certaines résidences sont très studieuses, d’autres le sont moins. Si vous aimez travailler seul et que votre concentration est tributaire de votre environnement, vous pourrez être gêné. Mais il sera toujours temps si nécessaire de travailler en bibliothèque.
On peut encore choisir une colocation mais là encore, il faut trouver les colocataires qui vous conviennent. Et on ne sait comment on fonctionne ensemble au quotidien qu'après en avoir fait l’expérience : partage des tâches, organisation des repas, bruit, occupation des espaces communs…
Enfin, certains étudiants s'accommodent très bien d'un logement en solo. Ils aiment s'organiser seul et goûtent avec plaisir le fait de n’avoir de compte à rendre à personne (exceptés à leurs voisins tout de même) concernant leur rythme de lever et de coucher, le menu des repas, le ménage, le programme télé ou l’heure du couvre-feu. Au contraire vivre à plusieurs génère des contraintes, mais offre également de la sécurité. Il faut faire des concessions, mais cela constitue une ressource en cas de besoin.
On peut de toute façon changer de formule d'une année sur l'autre, car on apprend peu à peu à se connaître.
Loger au sein de la famille (chez des oncles ou tantes, des grands-parents...) permet, si c'est possible, de faire une transition en douceur et de s'habituer pas à pas à la vie étudiante avant de voler de ses propres ailes.
La résidence étudiante peut aussi constituer un bon compromis. Vous logez dans une chambre individuelle, mais vous êtes entouré d’étudiants qui comme vous, doivent travailler et ont à cœur de trouver leur voie. En cas de besoin, il n'y a pas à aller loin pour trouver de l'aide.
Par contre, certaines résidences sont très studieuses, d’autres le sont moins. Si vous aimez travailler seul et que votre concentration est tributaire de votre environnement, vous pourrez être gêné. Mais il sera toujours temps si nécessaire de travailler en bibliothèque.
On peut encore choisir une colocation mais là encore, il faut trouver les colocataires qui vous conviennent. Et on ne sait comment on fonctionne ensemble au quotidien qu'après en avoir fait l’expérience : partage des tâches, organisation des repas, bruit, occupation des espaces communs…
Enfin, certains étudiants s'accommodent très bien d'un logement en solo. Ils aiment s'organiser seul et goûtent avec plaisir le fait de n’avoir de compte à rendre à personne (exceptés à leurs voisins tout de même) concernant leur rythme de lever et de coucher, le menu des repas, le ménage, le programme télé ou l’heure du couvre-feu. Au contraire vivre à plusieurs génère des contraintes, mais offre également de la sécurité. Il faut faire des concessions, mais cela constitue une ressource en cas de besoin.
On peut de toute façon changer de formule d'une année sur l'autre, car on apprend peu à peu à se connaître.
Que faire et à qui s'adresser si on se sent dépassé ou que l'on rencontre des difficultés ?
Il est vraiment essentiel de savoir reconnaître ses difficultés lorsque l'on en rencontre, et de demander de l’aide. Les proches sont les premières personnes vers lesquelles vous devez vous tourner : les parents évidemment, la famille élargie (grands-parents, oncles, tantes, frères et sœurs…), mais également vos amis et les étudiants qui ont plus d’expérience.
Il demeure cependant que certains problèmes spécifiques sont difficiles à évoquer avec ceux qui nous connaissent trop bien. Beaucoup d’étudiants ont également peur d’être jugés, et s'enferment parfois dans une position de retrait qui les isole encore davantage.
Sachez que des professionnels sont là pour vous aider à trouver les ressources qui vous seront utiles et les interlocuteurs les plus à même de vous soutenir, en fonction des difficultés que vous rencontrez.
N'oubliez pas, si vous en ressentez le besoin, de vous tourner vers le CROUS (centre régional des œuvres universitaires et scolaires), le CIO (centre d’information et d’orientation), la médecine universitaire ou le Bureau d'aide psychologique universitaire (BAPU). Vous pourrez y rencontrer des professionnels (médecin, assistante sociale, psychologue, conseiller d’orientation, infirmière…) qui pourront vous accompagner et vous orienter gratuitement".
Il demeure cependant que certains problèmes spécifiques sont difficiles à évoquer avec ceux qui nous connaissent trop bien. Beaucoup d’étudiants ont également peur d’être jugés, et s'enferment parfois dans une position de retrait qui les isole encore davantage.
Sachez que des professionnels sont là pour vous aider à trouver les ressources qui vous seront utiles et les interlocuteurs les plus à même de vous soutenir, en fonction des difficultés que vous rencontrez.
N'oubliez pas, si vous en ressentez le besoin, de vous tourner vers le CROUS (centre régional des œuvres universitaires et scolaires), le CIO (centre d’information et d’orientation), la médecine universitaire ou le Bureau d'aide psychologique universitaire (BAPU). Vous pourrez y rencontrer des professionnels (médecin, assistante sociale, psychologue, conseiller d’orientation, infirmière…) qui pourront vous accompagner et vous orienter gratuitement".
Pour aller plus loin
- Titulaire d'un master de psychologie clinique et d'un doctorat de sociologie, Hélène Weber a rejoint en 2010 l'équipe éducative de l'Université de technologie de Troyes (UTT), école d'ingénieurs postbac. Elle est chargée de mettre en place un dispositif d'accompagnement des étudiants de première année, en vue de les aider à s'adapter aux exigences des études supérieures et à bâtir un projet professionnel.
- Elle anime aussi un blog personnel, partenaire de reussirmavie.net, qui peut intéresser tout étudiant : http://donnezdusens.fr invite à donner du sens à ses études en exploitant ses ressources et en définissant son projet : nombreux conseils méthodologiques (lecture efficace, mémorisation, expression) et de développement personnel (motivation, stress, connaissance de soi). A faire connaître à vos amis.
Sur le même sujet : notre rubrique Bons plans logement