Tabac : la campagne Tueurs-Payeurs veut faire payer les cigarettiers


Avec la campagne Tueurs-Payeurs, la Ligue contre le cancer veut que les Etats du G20 imposent une nouvelle taxe aux industriels du tabac. Manifestation dans Paris, pétition, vidéo, les anti-tabac multiplient les actions choc pour rappeler que le tabagisme tue.




Défilé Tueurs Payeurs place de l'Etoile à Paris.
Opération choc dans les rues de Paris, le mercredi 2 novembre 2011. En cette fête des défunts, les militants de la Ligue contre le cancer sillonnent la capitale dans 17 voitures arborant le slogan "Tueurs Payeurs". Une allusion au fameux principe  "Pollueurs Payeurs" qui vise à taxer les auteurs de pollution. Sauf que là, les "tueurs" désignés par la Ligue sont les industriels du tabac. Les 40 000 faux paquets de clopes uniformément blancs distribués aux passants portent d'ailleurs l'inscription "Le tabac tue".

A l'intérieur, un dépliant rappelle d'abord ce constat que les fumeurs tâchent toujours d'oublier : en France, le tabac est responsable de plus de 60 000 morts par an dont 37 000 par cancer. C'est la première cause de mortalité "évitable". Ensuite, le tabagisme augmente : en 2010, 29,1% de la population fume contre 27,1% en 2005. La France connaît donc un retour en arrière de dix ans en matière de lutte contre le tabac, et cela malgré l'augmentation régulière des prix des paquets !

Que demande la campagne Tueurs-Payeurs ?

Que les Etats instaurent un prélèvement direct et obligatoire (d'un montant de 10 cents de dollar sur un paquet) sur les bénéfices des industriels du tabac. La Ligue rapproche en effet  le chiffre des 15 000 personnes qui meurent chaque jour des méfaits du tabac des 900 millions de dollars empochés par les quatre grands cigarettiers.

Le "prélèvement solidaire" qu'elle propose se veut à la fois éthique (fidèle au principe "pollueur-payeur"), mondial, non pénalisant pour les consommateurs et les Etats et de nature à rapprocher les pays du Nord et du Sud. "Les fonds collectés serviront à prendre en charge les conséquences sanitaires et sociales de la consommation du tabac (accompagner les fumeurs dans l’arrêt, financer des campagnes de prévention et des actions de terrain, etc.), au niveau mondial, dans les pays industrialisés comme dans les pays en voie de développement", explique le communiqué de la Ligue contre le cancer.

La Ligue milite aussi pour que les paquets aient un design neutre sans mention d'aucune marque, comme en Australie où tous les paquets sont verts. Une idée qui rappelle les photos chocs des méfaits du tabac sur les paquets dont l'effet dissuasif n'est pas évident.

Quels moyens d'action ?

Pour soutenir l’action tueurs-payeurs, la Ligue contre le cancer propose à ceux qui le veulent de signer une pétition sur le site de la campagne : www.tueurs-payeurs.fr
Son objectif était de remettre un maximum de signatures aux décideurs internationaux lors du G20 à Cannes les 3 et 4 novembre 2011.

Elle cherche aussi à créer le buzz sur internet avec sa vidéo Tueurs-Payeurs.


La France a dit non à la taxe

En France, un amendement instaurant une taxe sur l'industrie du tabac, devant rapporter environ 50 millions d'euros à la Caisse nationale d'assurance maladie a finalement été rejeté par les députés le 27 octobre 2011. Les députés PS et EELV ont voté pour cet amendement et certains députés UMP comme le cardiologue Yves Door.

Mais la ministre du Budget Valérie Pécresse a rétorqué que le gouvernement soumettait déjà l'industrie du tabac à "une hausse de tarifs constante et répétée chaque année" et avait demandé cette année aux cigarettiers "un effort important de 250 millions d'euros" pour financer l'activité des buralistes et "sortir d'une logique où l'Etat subventionne les buralistes".

"Nous risquons de faire payer votre taxe par les fumeurs, alors que le prix du tabac a augmenté de 18% en trois ans", a-t-elle lancé, demandant, en vain, le retrait de l'amendement. Une majorité de députés UMP a donc suivi le gouvernement et voté contre. Après le vote de l'amendement en commission, Yves Trévilly, porte-parole de British American Tobacco France, avait affirmé qu'une telle taxe "conduirait à augmenter encore le prix des cigarettes" et risquerait de "déporter les achats" vers les pays frontaliers ou le tabac de contrebande.

L'alliance objective d'un gouvernement qui cherche à tout prix à colmater les brèches de son budget, et des industriels du tabac qui agitent la menace de nouvelles augmentations des prix a donc eu raison des défenseurs de la santé publique. En tout cas pour l'instant.

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Rédigé par le Vendredi 4 Novembre 2011
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