Les droits et devoirs du stagiaire


Les stages sont stratégiques pour une bonne insertion professionnelle, mais gare aux abus. La loi de juillet 2014 a donc une nouvelle fois encadré les droits des stagiaires, les obligations des entreprises et des établissements de formation. De la recherche du stage à la gratification, le point sur vos droits mais aussi vos devoirs.



La convention de stage définit la mission du stagiaire et fixe sa gratification.
Du lycée aux études supérieures, les stages se multiplient. Et pour cause : ces premières expériences en entreprise permettent à la fois de découvrir un univers professionnel, de développer des compétences, de cerner ses goûts et sa vocation, de prendre confiance en soi et souvent, pour les stages de fin d'études, de décrocher un CDI.

Même l'université propose désormais de faire des stages à partir de la licence.

Reste à faire le bon stage, celui qui va correspondre à votre formation et pourra se dérouler de bonnes conditions. Gare au stage bidon où vous mourez d'ennui à ne rien faire, ou bien à ceux où vous trimez comme un fou pour remplacer deux salariés malades...

Mais au fait, quels sont vos droits comme stagiaire vis-à-vis de l'entreprise qui vous accueille et de l'école qui vous envoie ? La loi publiée au Journal Officiel du 10 juillet 2014 a rassemblé toutes les dispositions antérieures et accordé de nouveaux droits des stagiaires. Sans oublier qu'ils ont aussi quelques devoirs. Prêts pour un tour d'horizon ?

Recherche de stage : les établissements doivent aider, vous devez vous bouger

C'est souvent le plus dur car du lycée à l'université en passant par l'école de commerce ou l'IUT, il faut souvent trouver son stage soi-même. Or des d'étudiants abandonnent chaque année leur formation faute de stage.

La loi de 2014 stipule donc que "l'établissement d'enseignement est chargé : d'appuyer et d'accompagner les élèves ou les étudiants dans leur recherche"... Si vous avez des difficultés, n'ayez pas peur de revenir assez tôt vers vos enseignants ou responsables pour demander de l'aide : par exemple une liste d'entreprises, une piste, un contact... Vous pouvez aussi demander à votre établissement des renseignements sur les possibilités de stages à l'étranger, notamment dans le cadre des programmes de l'Union européenne.

Attention tout de même : votre école est tenue de vous aider, pas de vous trouver un stage. En général, les formateurs veulent que les étudiants se bougent et apprennent à contacter eux-mêmes les entreprises. Même si l'on vous donne une offre de stage, c'est à vous d'appeler, d'envoyer un CV, et de faire valoir votre motivation. C'est même votre premier devoir car cette recherche elle-même est formatrice.

La convention de stage : obligatoire et centrale

Pas de stage sans convention.
Vous ne pouvez pas faire de stage (obligatoire ou non) sans qu'une convention de stage soit établie. Qu'est-ce que cette convention ? Un contrat, qui engage trois parties : l'établissement dans lequel vous étudiez, l'entreprise, et vous-même, l'étudiant stagiaire. Vous ne pouvez commencer un stage tant que les trois parties n'ont pas signé cette convention.

Cette convention doit préciser "les compétences à acquérir ou à développer au cours du stage et la manière dont ce temps s'inscrit dans le cursus de formation". Cela permet de s'assurer que le stage va être en rapport avec vos études et la formation professionnelle que vous poursuivez.

La loi oblige aussi les établissements à donner un minimum de formation avant d'envoyer les étudiants en stage : gare aux abus de certaines écoles de commerce qui ne donnent quasiment aucun cours et comptent sur l'entreprise pour tout vous apprendre !
Les stages ne peuvent pas durer plus de six mois

La convention de stage, très importante, précise aussi le lieu, la durée du stage, les horaires, et les "gratifications" qui seront versées au stagiaire.

Pour éviter les abus, la loi de juillet 2014 a limité la durée des stages à six mois. Au-delà, le législateur considère qu'il s'agit d'un emploi ! Certaines écoles peuvent avoir des dérogations pour des stages plus longs, le temps d'adapter leur cursus. Mais en 2016, deux ans après le vote de la loi de 2014, aucune dérogation ne sera plus accordée.

Il n'y a pas de durée minimale de stage : on peut faire un stage d'une semaine par exemple.

La gratification et les avantages auxquels vous avez droit

Depuis 2011, les stages de plus de deux mois doivent être rémunérés, non par un "salaire" mais une "gratification".

La loi de 2014 a augmenté le montant mensuel minimum de cette gratification de 87 euros, la faisant passer à 523,26 euros. Ceci n'entre toutefois en vigueur que pour les stages démarrant le 1er septembre 2015.

Cette gratification doit vous être versée chaque mois, et non au bout de deux, trois ou six mois en une seule fois. D'autre part, si vous devez interrompre votre stage avant les deux mois minimum, l'entreprise doit vous verser le montant de la gratification qui correspond au temps que vous avez fait.
Des tickets restaurant et des frais de transport en partie remboursés

Belle nouveauté depuis la loi de juillet 2014 : les sommes perçues par les stagiaires ne sont plus soumises à l'impôt, une bonne nouvelle pour les familles des étudiants.

Ni le stagiaire ni l'entreprise ne versent non plus de cotisations sociales sur la gratification minimale, mais si la gratification est plus élevée que 553,26 euros (cela arrive), il y a des cotisations sur la différence.

Autre acquis de la loi de 2014 : un stagiaire a droit au restaurant d'entreprise (s'il y en a) au même tarif qu'un salarié ou à défaut il peut avoir des tickets restaurant. L'entreprise doit aussi lui rembourser une partie de ses frais de transport comme elle le fait habituellement.

A partir de deux mois de stages, l'entreprise doit vous accorder droit à des congés ou possibilité de vous absenter. Tout ceci est indiqué dans la convention de stage mais n'ayez pas peur de poser (poliment) question sur ces points pratiques en la signant.

Votre temps de travail : les droits et devoirs d'un salarié ordinaire

La loi de 2014 indique que "La présence du stagiaire dans l'organisme d'accueil suit les règles applicables aux salariés de l'organisme pour ce qui a trait :
1° Aux durées maximales quotidienne et hebdomadaire de présence ;
2° A la présence de nuit ;
3° Au repos quotidien, au repos hebdomadaire et aux jours fériés
".

Autrement dit : vous devez vous plier aux horaires de l'entreprise, ce qui paraît bien naturel pour un stagiaire qui cherche à découvrir la vie professionnelle.

L'un des premiers devoirs de celui ou celle qui veut réussir son stage est en effet de s'adapter au rythmes de l'entreprise qui l'accueille. Evitez notamment d'arriver en retard le matin.

Votre mission : un tuteur et un enseignant référent pour vous guider

La loi tente aussi d'encadrer le contenu des tâches qui peuvent vous être confiées, le but étant d'arriver à des "stages de qualité".

- L'entreprise doit fournir un stage qui correspond à vos études. Elle doit aussi vous donner un tuteur, qui est un salarié chargé de vous accueillir, vous guider, et de faire le point avec vous à la fin. Demandez toujours qui sera votre tuteur avant de démarrer. Si possible, rencontrez-le lors d'un entretien.

- D'autre part, votre école ou établissement doit aussi désigner "un enseignant référent" membre de son équipe, "qui s'assure du bon déroulement du stage et du respect de la convention", indique la loi de juillet 2014.
Cet enseignant peut demander à ce que votre mission soit revue si elle ne se déroule pas bien. C'est un nouveau soutien apporté au stagiaire qui se retrouve souvent bien seul quand le stage est commencé.

Là encore, ne soyez pas passif : si les choses ne se déroulent pas comme vous le voudriez ou comme prévu dans la convention de stage, n'hésitez pas à en parler à votre tuteur en entreprise et si cela ne suffit pas, contactez votre enseignant référent. Apprenez à dialoguer, exprimez vos attentes.

Enfin, n'oubliez pas que vous avez aussi des devoirs quant à votre mission. En signant la convention, vous vous engagez :
- à réaliser  les tâches qui vous sont confiées. Il vous faut être à la fois humble (vous êtes là pour apprendre), mais aussi actif et impliqué : demandez du travail, proposez votre aide si vous manquez d'occupation, posez des questions et soyez ouvert.

- à respecter le règlement de l'entreprise notamment les règles de confidentialité éventuelles.

En cas d'abus, le stagiaire peut saisir les prudhommes

Et si l'on vous fait trimer comme un forçat pour rattraper des mois de retard, ou bien si vous vous retrouvez avec les responsabilités qui devraient être assumées par un salarié ? C'est arrivé hélas à nombre de stagiaires.

C'est pourquoi la loi de juillet 2014 précise que : "Aucune convention de stage ne peut être conclue pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent, pour faire face à un accroissement temporaire de l'activité de l'organisme d'accueil, pour occuper un emploi saisonnier ou pour remplacer un salarié ou un agent en cas d'absence ou de suspension de son contrat de travail".

Le nombre de stagiaires qu'une entreprise peut employer a aussi été limité par la loi de 2014, et l'inspection du travail est chargée de contrôler son application.

En tant que stagiaire, si l'on vous fait faire le travail d'un salarié, vous pouvez aussi saisir le tribunal des prudhommes pour faire requalifier votre stage en véritable emploi.

Fin de stage : une attestation, un rapport, une soutenance

Vous devez respectez la convention et le code de l'entreprise.
A la fin du stage, l'entreprise s'engage à rédiger une attestation décrivant les missions effectuées par le stagiaire. L'attestation est en général remise par l'école et doit lui être retournée. Vous pourrez la garder dans votre dossier et la présenter à des entreprises avec votre CV lors d'une recherche d'emploi.

De votre côté, en signant la convention de stage, vous vous êtes engagé à rédiger le rapport de stage demandé par votre établissement. N'oubliez pas d'envoyer votre rapport au responsable de stage qui vous a accueilli en entreprise... et n'oubliez pas de le remercier dans la page de garde !

Ceci n'est pas vraiment un "devoir" mais un code de bonne conduite si vous voulez vous bâtir un réseau. Mieux vaut garder de bons contacts avec ceux qui vous ont accueilli en stage : vous pourrez ainsi les recontacter lorsque vous chercherez du travail.

Pour en savoir plus

- Le texte de la loi du 10 juillet 2014 "tendant au développement, à l'encadrement des stages et à l'amélioration du statut des stagiaires"

- En cas de problème lors d'un stage, vous devez bien sûr vous tourner vers vos responsables de stage en entreprise et dans votre école. Si vous souhaitez recevoir un conseil juridique, vous pouvez consulter le collectif "Génération Précaire" qui défend et conseille les étudiants victimes d'abus lors des stages

Mardi 20 Décembre 2016

Dans la même rubrique :