La sélection en Master 1 définitivement adoptée


L'Assemblée nationale a adopté définitivement le 19 décembre 2016 la réforme de l'entrée en master. Dès la rentrée 2017, les universités pourront sélectionner à l'entrée en master 1 et plus en master 2. Les étudiants recalés conserveront un droit à la poursuite d'étude dans un autre master.




Le long débat sur la sélection en master a trouvé son épilogue, le 19 décembre 2016, avec le vote définitif d'une proposition de loi réformant le dispositif. Rappelons que les études supérieures en Europe sont organisées depuis 2002 sur le schéma européen LMD : après la licence (trois ans d'études, L1, L2, L3), il y a le master, diplôme qui se prépare en deux ans en master 1 et master 2.

Mais certaines universités françaises avaient gardé un cursus calqué sur le système antérieur où l'étudiant décrochait une licence (bac+3), puis une maîtrise (bac+4) et enfin un diplôme de niveau bac+5 appelé DEA ou DESS.

Résultat : certaines formations ont continué jusqu'en 2016 à opérer une sélection entre les deux années de master. Certains étudiants ayant attaqué l'Etat pour "sélection illégale", et le Conseil d'Etat leur ayant donné raison contre les universités, il y avait urgence pour l'Etat à ramener l'ordre dans les esprits !

Or, en France, tout ce qui touche à la sélection est hautement polémique : les présidents d'université voulaient qu'on leur accorde le droit de sélectionner les étudiants à l'entrée en M1 et les syndicats étudiants, notamment l'Unef, étaient opposés par principe à toute sélection.

La sélection instituée à l'entrée en 1ère année de master

Un accord a pourtant été conclu le 4 octobre 2016 par le ministère de l'Enseignement supérieur avec les présidents d'université, les syndicats de personnel et d'étudiants et il a servi de base à la nouvelle loi adoptée par les parlementaires français.

Il est ainsi gravé dans la loi que "le cursus conduisant au diplôme national de master est un cursus de 4 semestres (donc sans sélection intermédiaire) qui doit pouvoir reposer sur un processus de recrutement à l'entrée dans le cursus".

Autrement dit : les universités n'auront plus le droit de refuser à certains étudiants de master 1 d'accéder au master 2, mais la sélection pourra se faire à l'entrée en master 1, c'est-à-dire après la licence sous la forme d'un concours ou de l'examen d'un dossier.

Le droit et la psycho font exception

Comme tout principe, il a ses exceptions. Ainsi, deux filières sont autorisées à conserver le système actuel, c'est-à-dire à sélectionner entre les deux années de master : le droit et la psychologie.

Mais cela doit être pour un "temps transitoire", indique le gouvernement, le temps qu'une réflexion soit menée pour tenir compte du lien entre le cursus universitaire et certaines professions réglementées. Le concours d'avocat est en effet accessible à bac+4, de même que l'entrée dans certaines formations très sélectives de psychologues cliniciens.

Chaque année cependant, des étudiants en psycho recalés à l'entrée en master 2 sont obligés d'arrêter des études qui ne conduisent plus sur rien : une clarification rapide serait donc souhaitable aussi dans ces filières.
 

Mais un droit à la poursuite d'études tout de même

Tout en donnant satisfaction aux présidents d'université qui réclamaient la possibilité de sélectionner, le ministère a voulu aussi satisfaire l'autre "partie" du débat, les syndicats étudiants et le clan anti-sélection.

Il est donc décidé que "tout titulaire du diplôme national de licence doit se voir proposer une poursuite d'étude dans un cursus conduisant au diplôme national de master."

Si un étudiant est refusé à toutes ses demandes (qui ne sont pas limitées en nombre), le recteur de son académie devra lui faire trois propositions alternatives dans un autre master, en lien avec son projet professionnel, et en priorité, si c'est possible dans son université ou à défaut, son académie.

S'il est contraint à "une mobilité", "pour qu'elle n'introduise pas un biais social, il sera mis en place un fonds spécifique d'aide à la mobilité qui pourrait se traduire par une bourse/prime d'installation", précise le ministère.

Un site internet trouvermonmaster.gouv.fr en projet

Concrètement, les étudiants auront donc en fin de licence un gros effort d'information à faire pour repérer les masters pouvant leur convenir, et surtout dans lesquels ils ont de bonnes chances d'être admis.

D'autre part les recteurs devront avoir aussi une visibilité en temps réel des places encore disponibles pour proposer trois alternatives aux étudiants recalés. C'est la raison pour laquelle le gouvernement va lancer une plateforme numérique intitulée trouvermonmaster.fr

Les responsables de master devront y indiquer :
- une description de la filière ;
- une description des pré-requis et notamment les mentions de licence qui sont conseillées pour accéder au master ;
- une description du dossier de candidatures (les pièces à fournir) ;
- le calendrier de candidature et le processus à suivre ;
- une description des parcours (s'ils existent) accessibles par des mots clefs (disciplines concernées et compétences visées) ;
- des renvois sur les sites web décrivant les contenus de la formation ;
- une information sur les capacités d'accueil.

Contrairement au site Admission-postbac, le nouveau n'assurera pas "la gestion des voeux". Les étudiants postuleront directement auprès de chaque université et celle-ci sera tenue de les informer d'un refus.

Et ça commence quand ?

La sélection à l'entrée en M1 doit démarrer à la rentrée 2017. Ce qui veut dire que la nouvelle plateforme devra être en ligne début 2017.

Par contre, pour les étudiants qui sont actuellement en Master 1 en 2016-2017, la loi ne sera pas rétroactive : ils auront encore à se soumettre à une éventuelle sélection pour entrer en Master 2 (avec toujours la possibilité de faire appel aux tribunaux pour obtenir une place !).

Des questions qui demeurent

Officiellement, la nouvelle loi semble satisfaire tout le monde : les universités qui pourront sélectionner les étudiants à l'entrée en master 1 et ceux qui réclamaient un droit à la poursuite d'études.

"Cette proposition de loi offre des garanties de clarté et de continuité aux établissements et aux étudiants, indique le communiqué publié le 19 décembre 2016 par le ministère de l'Enseignement supérieur. Désormais, aucun diplômé de licence souhaitant poursuivre ses études en master ne sera sans solution, sans choix, sans droit."

Concrètement, on ignore encore comment s'appliquera précisément le "droit à la poursuite d'études" inscrit dans loi : les étudiants non admis au master 1 de leur choix saisiront-ils le recteur pour demander à être inscrits "de droit" dans un autre master ? Accepteront-ils les propositions qui leur seront faites ? Quels seront ces masters proposés aux "recalés" ? Les recteurs auront-ils suffisamment d'informations en temps réel sur les places disponibles pour répondre aux demandes ? Le diplôme national de master ne risque-t-il pas d'être "galvaudé" par le droit systématique à la poursuite d'études ?

Une période d'évaluation de trois ans

Il est encore bien trop tôt pour que ces questions - largement soulevées par l'opposition à l'Assemblée nationale - puissent trouver réponse. Le texte de loi adopté fin 2017 prévoit donc une période d'évaluation de trois ans du nouveau dispositif qui a en tout cas le mérite de rendre plus transparent le choix d'un master à l'université.

On attend en effet avec intérêt la mise en ligne du portail Trouvermonmaster.gouv.fr qui présentera, début 2017 l'offre des 3000 masters de l'enseignement supérieur français.



Rédigé par la rédaction le Jeudi 22 Décembre 2016
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