Lucie, 25 ans, diplômée d'une école de design : "Les yeux cernés, mais heureuse"
Lucie, son conjoint et leur fils (DR)
"Je suis tombée enceinte à 18 ans. A ce moment-là, je faisais une «mise à niveau» dans le but d’intégrer un BTS Design d’espace. La grossesse nous est tombée dessus au moment où nous commencions à en parler avec mon compagnon, nous étions donc très heureux.
Mais pour moi, il n'était pas question d’arrêter mes études pour autant. Je voulais être dans l'art, faire un métier passionnant, pas seulement travailler pour gagner des sous. J'ai donc décidé de tenter d'obtenir mon BTS par correspondance. C'était une sorte de défi, un moyen de ne pas laisser tomber l'école. Tout le monde me conseillait de prendre une année sabbatique, mais pour moi c'était surtout prendre le risque de ne jamais reprendre.
Chaque matin, je m'occupais de mon fils, puis je le déposais quelques heures à la halte-garderie pour travailler. En parallèle, j'attendais beaucoup de mon conjoint. Il avait du mal à se positionner en tant que père. Il poursuivait sa vie d'étudiant, et j'avais l'impression d’endosser tous les rôles. Nous avons eu une énorme dispute, mais qui a été nécessaire et bénéfique. Chacun a trouvé sa place, les choses sont rentrées dans l'ordre. Mon conjoint s'est mieux organisé pour ses études, il révisait ses cours dans le train en rentrant de l'école ou pendant sa pause déjeuner. Il nous a consacré plus de temps et nous nous sommes enfin retrouvés dans cette nouvelle vie à trois.
Je n’ai pas eu mon BTS, mais j’ai réussi le concours d’entrée d’une école de design. J’étais très heureuse de retrouver une vraie vie étudiante, de sortir de mon isolement. Et cela même si les autres élèves me posaient beaucoup de questions : ‘Tu es toujours avec le papa ?’, ‘Pourquoi l'as-tu eu si jeune ?’ Cela ne m'a pas blessée, j'avais entendu bien pire pendant ma grossesse.
Durant ces trois années de formation, je me suis organisée pour travailler tous les soirs après avoir couché mon fils. Il y a eu beaucoup de nuits blanches, j'arrivais souvent les yeux cernés, mais heureuse à l’école. Par contre, les week-ends étaient réservés à ma famille.
Au mois de juillet 2015, j'ai obtenu mon diplôme. Depuis, j'ai travaillé avec une agence de communication et je me suis installée, il y a peu, en tant que graphiste avec un statut d'auto-entrepreneur. Tout cela m’a fait mûrir, m'a prouvé que j'étais capable d’avoir des priorités, et que quelle que soit la situation, on peut se donner les moyens d’atteindre ses objectifs.
Mais pour moi, il n'était pas question d’arrêter mes études pour autant. Je voulais être dans l'art, faire un métier passionnant, pas seulement travailler pour gagner des sous. J'ai donc décidé de tenter d'obtenir mon BTS par correspondance. C'était une sorte de défi, un moyen de ne pas laisser tomber l'école. Tout le monde me conseillait de prendre une année sabbatique, mais pour moi c'était surtout prendre le risque de ne jamais reprendre.
Chaque matin, je m'occupais de mon fils, puis je le déposais quelques heures à la halte-garderie pour travailler. En parallèle, j'attendais beaucoup de mon conjoint. Il avait du mal à se positionner en tant que père. Il poursuivait sa vie d'étudiant, et j'avais l'impression d’endosser tous les rôles. Nous avons eu une énorme dispute, mais qui a été nécessaire et bénéfique. Chacun a trouvé sa place, les choses sont rentrées dans l'ordre. Mon conjoint s'est mieux organisé pour ses études, il révisait ses cours dans le train en rentrant de l'école ou pendant sa pause déjeuner. Il nous a consacré plus de temps et nous nous sommes enfin retrouvés dans cette nouvelle vie à trois.
A l'école on me disait : "Tu es toujours avec le papa ?"
Je n’ai pas eu mon BTS, mais j’ai réussi le concours d’entrée d’une école de design. J’étais très heureuse de retrouver une vraie vie étudiante, de sortir de mon isolement. Et cela même si les autres élèves me posaient beaucoup de questions : ‘Tu es toujours avec le papa ?’, ‘Pourquoi l'as-tu eu si jeune ?’ Cela ne m'a pas blessée, j'avais entendu bien pire pendant ma grossesse.
Durant ces trois années de formation, je me suis organisée pour travailler tous les soirs après avoir couché mon fils. Il y a eu beaucoup de nuits blanches, j'arrivais souvent les yeux cernés, mais heureuse à l’école. Par contre, les week-ends étaient réservés à ma famille.
Au mois de juillet 2015, j'ai obtenu mon diplôme. Depuis, j'ai travaillé avec une agence de communication et je me suis installée, il y a peu, en tant que graphiste avec un statut d'auto-entrepreneur. Tout cela m’a fait mûrir, m'a prouvé que j'étais capable d’avoir des priorités, et que quelle que soit la situation, on peut se donner les moyens d’atteindre ses objectifs.
Isabelle, 21 ans, en école d'ingénieur : «Notre fille a donné du sens à nos études »
"Lorsque Jean et moi avons appris que j'étais enceinte, nous étions tous les deux étudiants. Nous venions tout juste de décider de nous marier. Mais malgré le fait que notre situation soit stable - nous étions ensemble depuis cinq ans- cette annonce a été une surprise.
Et au tout début, lorsque nous étions seuls à être au courant, cela a été source d’inquiétudes : Jean se posait des questions matérielles et moi je me demandais si j'étais prête à être mère. Je craignais aussi un peu les réactions de notre entourage, mais en réalité les gens se sont montrés très heureux pour nous. J’ai commencé à ressentir la joie d’être enceinte, puis à la première échographie, en voyant le bébé, s'est produit un déclic, j’ai vraiment réalisé qu’il y avait une petite vie et cela a été magique.
A la naissance de notre fille, Raphaëlle, nous avons été très soutenus par nos familles respectives. Ils nous ont aussi aidés sur le plan matériel, et Jean a également trouvé un apprentissage qui lui a permis d’avoir un salaire. Nous avons aussi pu compter sur les aides financières de l'Etat qui sont assez importantes.
Mon école d’ingénieur, qui compte peu de filles, n’avait pas l'habitude d'avoir une jeune femme enceinte parmi ses élèves. Ils ont cependant été très compréhensifs et j'ai pu prendre six mois de césure pour m'occuper de ma fille. Durant ces six mois, nous avons appris à nous connaître et cela m'a permis d'entrer pleinement dans mon rôle de maman. Et avec Jean, nous avons aussi célébré notre mariage.
Après ces six mois de césure, j'ai ressenti le besoin de reprendre une activité intellectuelle. Il était important pour moi de retrouver mes études. Concrètement, au quotidien, cela nécessite une certaine organisation. Il faut anticiper davantage ses révisions. On ne peut pas s’y prendre à la dernière minute car on ne sait jamais si notre fille va être de bonne humeur, si elle va dormir... Elle a aussi pris l’habitude de jouer à côté de nous pendant que nous travaillons et nous nous relayons auprès d’elle pour permettre à chacun de réviser.
Nous essayons également de garder une vie étudiante et des sorties, mais il est certain que nos centres d’intérêt ont changé. On ne va pas aller boire une bière ou regarder des séries en sortant des cours. Mais je ne le regrette pas, bien au contraire, c'est une grande joie d'avoir notre fille. Lorsque je travaille, cela a beaucoup plus de sens qu’auparavant, et après l'école, je suis très heureuse de courir pour aller la chercher.
Grâce à elle, nous menons aussi une vie beaucoup plus saine. Nous savons qu'à sept heures, nous sommes levés, nous sortons régulièrement nous promener et maintenant qu’elle commence à manger comme nous, nous faisons plus attention à ce que nous préparons.
Je suis aujourd'hui en deuxième année, il me reste un an et demi d'études, mais j'ai mûri et mes priorités ont changé. Si je souhaite, bien sûr, avoir une vie professionnelle intéressante, ce que je veux avant tout, c'est avoir d'autres enfants et construire une vie heureuse et harmonieuse autour de ma famille."
Et au tout début, lorsque nous étions seuls à être au courant, cela a été source d’inquiétudes : Jean se posait des questions matérielles et moi je me demandais si j'étais prête à être mère. Je craignais aussi un peu les réactions de notre entourage, mais en réalité les gens se sont montrés très heureux pour nous. J’ai commencé à ressentir la joie d’être enceinte, puis à la première échographie, en voyant le bébé, s'est produit un déclic, j’ai vraiment réalisé qu’il y avait une petite vie et cela a été magique.
"J'ai pu prendre six mois de césure pour accueillir ma fille"
A la naissance de notre fille, Raphaëlle, nous avons été très soutenus par nos familles respectives. Ils nous ont aussi aidés sur le plan matériel, et Jean a également trouvé un apprentissage qui lui a permis d’avoir un salaire. Nous avons aussi pu compter sur les aides financières de l'Etat qui sont assez importantes.
Mon école d’ingénieur, qui compte peu de filles, n’avait pas l'habitude d'avoir une jeune femme enceinte parmi ses élèves. Ils ont cependant été très compréhensifs et j'ai pu prendre six mois de césure pour m'occuper de ma fille. Durant ces six mois, nous avons appris à nous connaître et cela m'a permis d'entrer pleinement dans mon rôle de maman. Et avec Jean, nous avons aussi célébré notre mariage.
Après ces six mois de césure, j'ai ressenti le besoin de reprendre une activité intellectuelle. Il était important pour moi de retrouver mes études. Concrètement, au quotidien, cela nécessite une certaine organisation. Il faut anticiper davantage ses révisions. On ne peut pas s’y prendre à la dernière minute car on ne sait jamais si notre fille va être de bonne humeur, si elle va dormir... Elle a aussi pris l’habitude de jouer à côté de nous pendant que nous travaillons et nous nous relayons auprès d’elle pour permettre à chacun de réviser.
On ne va plus boire une bière ou regarder une série en sortant des cours
mais je ne le regrette pas
mais je ne le regrette pas
Nous essayons également de garder une vie étudiante et des sorties, mais il est certain que nos centres d’intérêt ont changé. On ne va pas aller boire une bière ou regarder des séries en sortant des cours. Mais je ne le regrette pas, bien au contraire, c'est une grande joie d'avoir notre fille. Lorsque je travaille, cela a beaucoup plus de sens qu’auparavant, et après l'école, je suis très heureuse de courir pour aller la chercher.
Grâce à elle, nous menons aussi une vie beaucoup plus saine. Nous savons qu'à sept heures, nous sommes levés, nous sortons régulièrement nous promener et maintenant qu’elle commence à manger comme nous, nous faisons plus attention à ce que nous préparons.
Je suis aujourd'hui en deuxième année, il me reste un an et demi d'études, mais j'ai mûri et mes priorités ont changé. Si je souhaite, bien sûr, avoir une vie professionnelle intéressante, ce que je veux avant tout, c'est avoir d'autres enfants et construire une vie heureuse et harmonieuse autour de ma famille."
Et quand le papa est parti ?
Et si l'on n'est pas encore en couple stable ? N'est-ce pas fou de donner naissance à un enfant dont le père est absent ? Pour certaines, c'est LA question centrale.
Voir le témoignage d'Anne qui s'est trouvée dans cette situation : Enceinte, j'ai choisi de garder mon enfant
Samira, 24 ans, licence d'économie : "Mes fils me donnent l’énergie pour réussir"
Samira, 24 ans, étudiante en licence d'économie et maman de deux garçons. (DR)
"J’ai toujours aimé les enfants et souhaité en avoir tôt. Je suis tombée enceinte lorsque j’étais en troisième année de psychologie. J’ai donc arrêté mes études, puis repris, une fois mon fils en crèche, mais cette fois en deuxième année d’économie.
Pendant ma grossesse, mon entourage m’a beaucoup découragée, j’ai souvent entendu : ‘Tu ne retourneras jamais à la fac, tu vas rester à la maison’. Du coup, lorsque j’ai validé ma deuxième année d’économie, j’ai ressenti une grande joie et beaucoup de fierté. Cela prouvait aux autres, mais aussi à moi-même, que l'on pouvait réussir ses études tout en élevant un enfant.
Bien sûr, il y a eu des difficultés, la gestion du quotidien est bien plus compliquée. Il fallait déposer mon fils à temps, organiser mes cours en fonction de la crèche. Cela a été particulièrement difficile au début avec les maladies qu’attrapent les enfants en collectivité. J’ai donc été souvent absente. Les élèves et parfois même les professeurs ne comprenaient pas. Ils pensaient que je le faisais exprès ou que c’étaient des prétextes pour ne pas venir. C’est tellement rare une jeune maman à la fac, et tellement loin des préoccupations des autres étudiants.
Je sais que ce n’est pas banal, mais nous avons rapidement voulu un deuxième enfant. Je ne me voyais pas être mère trop tard, je veux profiter de ma famille au maximum. Mais au niveau des cours, l’année dernière a été très difficile, j’ai raté ma licence. J’ai accouché en décembre dernier et j’ai décidé de suivre les cours par correspondance.
Je passe donc tous mes examens en avril à l’université de Rennes. Je suis un peu stressée mais je réussis à m'organiser. Je m'appuie sur mon mari qui est au chômage en ce moment, mais aussi sur mes parents chez qui je peux déposer les enfants de temps en temps pour travailler. Je profite également des nuits, lorsque la maison est calme et que tout le monde dort !
Ce n'est pas simple de réviser et de travailler seule. Les jeunes mamans sont souvent isolées. C’est pourquoi j’ai créé un groupe Facebook pour que nous puissions nous motiver et partager nos expériences et nos conseils. Cela fait du bien de discuter avec d’autres personnes dans le même cas. Il est vrai qu’il y a maintenant un fossé entre mes préoccupations et celles des autres étudiants.
Parfois, les sorties, le shopping me manquent mais rien ne m’empêche d’aller dîner au restaurant avec des amis. Et le plus important est que, malgré les difficultés, c’est une grande joie d’être maman. Mes fils me donnent toute l’énergie dont j’ai besoin pour réussir.
Pendant ma grossesse, mon entourage m’a beaucoup découragée, j’ai souvent entendu : ‘Tu ne retourneras jamais à la fac, tu vas rester à la maison’. Du coup, lorsque j’ai validé ma deuxième année d’économie, j’ai ressenti une grande joie et beaucoup de fierté. Cela prouvait aux autres, mais aussi à moi-même, que l'on pouvait réussir ses études tout en élevant un enfant.
"C’est tellement rare une jeune maman à la fac, et tellement loin des préoccupations des autres étudiants."
Bien sûr, il y a eu des difficultés, la gestion du quotidien est bien plus compliquée. Il fallait déposer mon fils à temps, organiser mes cours en fonction de la crèche. Cela a été particulièrement difficile au début avec les maladies qu’attrapent les enfants en collectivité. J’ai donc été souvent absente. Les élèves et parfois même les professeurs ne comprenaient pas. Ils pensaient que je le faisais exprès ou que c’étaient des prétextes pour ne pas venir. C’est tellement rare une jeune maman à la fac, et tellement loin des préoccupations des autres étudiants.
Je sais que ce n’est pas banal, mais nous avons rapidement voulu un deuxième enfant. Je ne me voyais pas être mère trop tard, je veux profiter de ma famille au maximum. Mais au niveau des cours, l’année dernière a été très difficile, j’ai raté ma licence. J’ai accouché en décembre dernier et j’ai décidé de suivre les cours par correspondance.
"Malgré les difficultés, c’est une grande joie d’être maman"
Je passe donc tous mes examens en avril à l’université de Rennes. Je suis un peu stressée mais je réussis à m'organiser. Je m'appuie sur mon mari qui est au chômage en ce moment, mais aussi sur mes parents chez qui je peux déposer les enfants de temps en temps pour travailler. Je profite également des nuits, lorsque la maison est calme et que tout le monde dort !
Ce n'est pas simple de réviser et de travailler seule. Les jeunes mamans sont souvent isolées. C’est pourquoi j’ai créé un groupe Facebook pour que nous puissions nous motiver et partager nos expériences et nos conseils. Cela fait du bien de discuter avec d’autres personnes dans le même cas. Il est vrai qu’il y a maintenant un fossé entre mes préoccupations et celles des autres étudiants.
Parfois, les sorties, le shopping me manquent mais rien ne m’empêche d’aller dîner au restaurant avec des amis. Et le plus important est que, malgré les difficultés, c’est une grande joie d’être maman. Mes fils me donnent toute l’énergie dont j’ai besoin pour réussir.