Les pros de la mode s'engagent contre l'anorexie

La charte est le fruit d'un travail fait par une commission sous la houlette de deux spécialistes : le pédopsychiatre Marcel Rufo et le sociologue Jean-Pierre Poulain. Mais pas besoin d'être spécialiste pour se rendre compte que les canons de la beauté sont les top models de la maigreur. Résultat ? Pour être belle, il faut leur ressembler.
D'où l'idée de la charte que la ministre de la santé a fait signer le 9 avril 2008 à des représentants du monde de l'image et de la mode. Parmi eux : le Bureau de vérification de la publicité, la Fédération française de prêt-à-porter féminin, l'Union des annonceurs, la Fédération française de la couture, le Syndicat des agences de mannequins, l'Union nationale des agences de mannequins et l'Union française des industries de l'habillement. A quoi s'engagent-ils en signant cette charte ? A ne pas promouvoir des images de mannequins "d'extrême maigreur" surtout si elles sont jeunes, à sensibiliser le public à la "diversité corporelle", et à participer aux campagnes de prévention que pourrait faire le ministère.

Le problème, c'est que la charte ne les oblige vraiment à rien de très précis. "Ce n'est qu'un engagement moral", reconnaît Marcel Rufo. Et dans le monde de la mode, certains sont très sceptiques.
La France n'a pas été jusqu'aux mesures contraignantes prises en Espagne où l'on a interdit aux mannequins trop maigres de défiler. Devra-t-on y venir ? Le problème du monde de la mode et de la haute couture est en effet double : non seulement les mannequins se mettent en danger elles-mêmes en se forçant durant des années à ne pas manger à leur faim pour atteindre l'image que l'on veut. Mais en plus, elles transmettent un idéal mortifère de beauté et entraînent des milliers de jeunes femmes dans des impasses dangereuses. On se souvient de la mort d'Ana Carolina Reston, en novembre 2006, mannequin brésilienne de 18 ans, morte d'une infection urinaire qui s'était généralisée car elle ne pesait plus que 40 kilos... (lire notre article)

D'autre part, l'Assemblée nationale doit examiner le 15 avril une proposition de loi déposée par la députée UMP Valérie Boyer : elle veut interdire l’apologie de l’anorexie sur Internet à travers les sites pro-ana. Si cette loi est adoptée, l'encouragement à l'extrême maigreur deviendrait un délit passible de deux ans de prison et 30 000 € d’amende.
Rappelons que 30000 à 40000 personnes souffrent d'anorexie en France dont des jeunes femmes à 95%. Cela représente 1,5% des adolescents. Le taux de mortalité par dénutrition après dix ans d’anorexie mentale est de 5%. Il atteint les 10% quand il s’agit d’anorexie boulimie. L'anorexie est d'autant plus terrible que c'est un mal sournois qui s'installe progressivement, lorsque le corps est soumis à des régimes continuels pour répondre à l'injonction de ne pas grossir. Le jour où l'on veut faire marche arrière (et remanger), il est souvent trop tard...

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